Histoire du bouchon (part one)
Il n'est pas rare, quand je me promène dans les rues de Nancy, d'être accosté par de nombreux admirateurs de ce blog et de son auteur (par grand vent, on frôle les 13 visites par jour dont une bonne moitié de recherches google "bucheron nue poilus", "cumulingus", "faire de la magie avec bouchon qui rentre dans bouteille", "mamies perverses au champagne" et "coment s'apele la blonde qui jout dans sydney fox nue").
Cette reconnaissance légitime bien réconfortante récompense le temps passé à oeuvrer pour propager le beau et la connaissance. Tels passants qui m'abordent n'hésitent pas en effet à me qualifier de "visionnaire", de "Michel-Ange du Bouchon", de "convivial", de "modérément sympathique", de "jean-foutre", de "connard", etc.
Il est vrai que l'art du bouchon est bien ancestral depuis au moins quelques années. Et c'est pour vous parler avec érudition et simplicité que j'ai invité aujourd'hui la Professeur Tatiana Rosenberg qui donne un cours sur le bouchon à l'université de Paris IV Sorbonne et récemment commissaire de l'exposition "Du beau, du bout, du bouchon" dans les galeries nationales du Grand Palais à Paris (capitale de la France, NDA).
En bonne pédagogue, Mme Rosenberg sait captiver l'attention de ses étudiants sans avoir besoin d'élever la voix.
1. Aux origines du bouchon : l'Antiquité
A. Le bouchon : vestige de la grande architecture classique ?
La forme du bouchon est héritée des fûts de colonnes antiques dont on affublait l'entrée des temples et des principaux édifices pour pas qu'ils se cassent la gueule à l'époque.
Fût de colonne gallo-romaine. Nantes, musée Dobrée. La ressemblance est frappante sans les petites cannelures.
Et il est vrai que depuis qu'on a ôté certaines de leurs colonnes, nombreux sont les temples antiques qui ont perdu leur fonction et leurs murs.
Explication de la diapositive :
Force est de constater, sur cette vue du forum romain à Rome, que seules les colonnes ont subsisté alors que les autres bâtiments qui n'ont plus de colonnes, n'ont plus rien du tout non plus. Au milieu en haut, les restes du temple de Castor et Pollux supportant encore un morceau d'architrave. A gauche, une jolie colonne toute seule surmontée d'un beau chapiteau corinthien finement ouvragé. Il est intéressant de noter que, contrairement à certaines plantes, les colonnes ne repoussent pas quand on les coupe à leur base (et ne grandissent pas plus vite quand on leur donne de l'engrais.)
Lors de notre visite, René s'est fait voler son portefeuille, comme quoi il faut se méfier des Italiens, surtout ceux de Madrid.
B. La couleur
La couleur du bouchon provient d'une déformation linguistique. Le matériau qui le compose est le liège, et qui dit Liège dit Belge, et qui dit Belge dit beige, CQFD. La Belgique, L'Italie, l'Espagne... parcourir l'histoire du bouchon, c'est entreprendre un long voyage sur les origines de notre civilisation.
2. Au Moyen-Âge
Epoque à la réputation de sombre, elle l'est en effet en ce qui concerne l'histoire du bouchon. Une erreur linguistique dont fut victime le bouchon. La fameuse phrase de Jeanne d'Arc n'était pas "Boutons les Anglois hors de France", mais bien "Bouchons les Anglois hors de France" ! Ca ne veut pas dire du tout la même chose, nous sommes bien d'accord. D'ailleurs, bien malin qui peut trouver une explication intelligible à cette phrase. Nos plus éminents spécialistes de l'histoire du bouchon se penchent sur la question.
3. La Renaissance et les temps modernes
Quelle belle période pour les arts que la Renaissance! Et qui dit art, dit bouchon. Léonard de Vinci, avant de créer son célèbre dessin de l'homme de Vitruve, s'était d'abord essayé à définir les proportions idéales du tire-bouchon, dans son non moins célèbrissime dessin du tire-bouchon de Vitruve. Peu de gens le savent mais Léonard est en effet l'inventeur de cet instrument bien pratique, qu'il avait surnommé à l'origine "extirpe-fût-de-liège-du-goulot-de-la-bouteille". Mais il s'est vite rendu compte que lors de ses soirées entre potes, il était bien long de dire "P'tain, mais où qu'il est encore passé l'extirpe-fût-de-liège-du-goulot-de-la-bouteille?! Merde les gars, vous assurez pas un cachou là, comment qu'on va l'boire le pinuche ? Allez quoi, c'est qui qui l'a ?.. faites pas vos bâtards!"
Le nom de tire-bouchon fit alors son apparition dans le langage courant.
La suite au prochain cours, et n'oubliez pas vos de faire vos devoirs à la maison. Qui sait, il y aura peut-être un contrôle la prochaine fois...