La soupe
L’excellente collection Découvertes/Gallimard vient de publier un remarquable ouvrage au caractère historique et culinaire indéniable, sous la direction de Louis Edmond Rogier, président de la Fédération Française de Soupe. Cette publication, richement illustrée, apporte un éclairage nouveau sur un mets dont on pensait tout savoir mais qui, au fil des pages, se dévoile sous un jour nouveau. Découvrons ensemble quelques courts extraits de ce livre surprenant à bien des égards.
Supaia, déesse grecque de la soupe, pourfandant de sa cuillère pointue, le corps froid et sans saveur de Cruditos (fruit des amours de Zeus et d'un potager)
Au commencement
On doit l'invention de la soupe au cuisinier du comte Edmond de Potage, cousin du duc Godefroy de Bouillon, en 1083. Mais ce n'est qu'au XVIe siècle qu'elle prendra la forme que nous lui connaissons actuellement : plus ou moins liquide avec des croûtons, de la crème fraîche et la grosse cuillère posée à côté de l’assiette sur une nappe vichy ou à même la table en noyer ciré. Jusque là, la soupe était solide et constituée essentiellement de légumes crus, terreux, mêlés à de l’eau froide croupie.
Les temps étaient durs jadis.
L’invention de la soupe moderne
Considéré à juste titre comme le Léonard de Vinci de la soupe, Peter Paulus Noodle le Jeune (1415-1463), dit «La Nouille», révolutionna l’art de la soupe au 15e siècle. En 1445, Noodle mit au point la soupe chaude. Il eut l’idée de filtrer l'eau, puis de la chauffer avant de la verser sur les légumes crus et nettoyés. Deux ans plus tard, une nouvelle étape allait être franchie : il fit préalablement cuire les légumes dans l'eau chaude avant de les écraser. Il vit que cela était bon.
Toutes les recherches de Noodle furent consignées dans un carnet de travail. On y retrouve, entre autres, le fameux dessin qui établit le diamètre idéal de l’assiette creuse. En 1492, Léonard s’inspira d’ailleurs de ses croquis en inscrivant son «homme de Vitruve» dans les contours de l’assiette à soupe de Noodle (le carré représente, quant à lui, les proportions idéales de la serviette de Vitruve pour pas s’en mettre partout.)
Un accessoire indispensable
Il ne restait plus que la cuillère à inventer. Depuis l’invention de la soupe liquide par Noodle, les soupes étaient bues à la fourchette avec pour conséquence de rendre les repas très longs et les plats suivants tout froids. C’est l’Anglais James McNeil Constable (1502-1537) qui, en 1536, eut l’idée de combler l’espace vide entre les dents de la fourchette. On cria alors à l'hérésie. Son corps sans vie fut retrouvé lardé de 124 coups de cuillères (ou de «fourchette ronde sans les trous» comme on l’appelait). Alors, accident domestique, crime fanatique ou expérience scientifique qui aurait mal tourné ?
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La soupe inspira une quantité importante de concours.Ci-dessus, l'élection de Miss Soupe en 1902.
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Et nous dans tout ça ? Je vous retranscris les propos de Monsieur Rogier, qui a eu l'amabilité de m'accorder un interviexw exclusif :
"Les progrès récents dans le domaine de la soupe sont rares. A croire que notre époque manque cruellement d'imaginitivité et de créativation ! Cà, pour envoyer des fusées sur la lune et faire les guignols à la télé, y a du monde ! mais dès qu’il s’agit d’inventer un truc nouveau en rapport avec la soupe, là tiens y a pus personne ! connards va !"
La virulence de ces propos illustre bien la frustration d'un homme qui a dédié sa vie à la soupe et qui souffre de laisser aux époques passées la gloire d'avoir gravé, dans le marbre à petits carreaux, la grande histoire de la soupe.
"Soupor, the flavour power"
(Vivons bien, vivons soupe !)
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Message personnel à tous :
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